Tout le bleu du ciel de Mélissa Da Costa

Résumé :

« Petitesannonces.fr : Jeune homme de 26 ans, condamné par un Alzheimer précoce, souhaite prendre le large pour un ultime voyage. Recherche compagnon(ne) d’aventure pour partager avec moi ce dernier périple. »

Émile n’a plus beaucoup de temps à vivre. Il a décidé de fuir l’hôpital, la compassion de sa famille et de ses amis. À son propre étonnement, il reçoit une réponse à cette annonce. Trois jours plus tard, avec le camping-car acheté secrètement, il retrouve Joanne, une jeune femme, qui a pour seul bagage un sac à dos, un grand chapeau noir, et aucune explication sur sa présence. Ainsi commence un voyage stupéfiant de beauté. À chaque détour de ce périple naît, à travers la rencontre avec les autres et la découverte de soi, la joie, la peur, l’amitié, l’amour qui peu à peu percent la carapace de douleurs d’Émile.

Ce que j’en pense :

Tout le bleu du ciel de Mélissa Da Costa fait plus de 830 pages. En le commençant, j’étais certes curieuse, mais surtout sceptique : j’avais peur de ne pas accrocher jusqu’au bout. Mais je me suis complètement trompée. La lecture est tellement entraînante que j’étais triste d’enfin reposer le livre.

Une lecture fluide et immersive

Emile, 26 ans, apprend qu’il est atteint d’une forme d’Alzheimer précoce : il ne lui reste plus que deux ans à vivre. Au lieu d’être branché à des machines à l’hôpital, le jeune homme décide de tout plaquer et de partir à l’aventure. Il poste alors une petite annonce sur internet, pour chercher un compagnon de voyage. Une femme de 29 ans, appelée Joanne, se manifeste. Ils vont partir tous les deux sur les routes des Pyrénées et faire de belles rencontres.

Cette situation de départ n’est pas très originale. Nombreux sont les personnages à quitter leur vie et à voyager, dans les romans feel-good. Je pense par exemple à Il est grand temps de rallumer les étoiles de Virginie Grimaldi. Néanmoins, Mélissa Da Costa se démarque très rapidement des autres écrivains. Son point fort à elle, c’est sa capacité à immerger le lecteur dans le récit. Je suis effectivement entrée très facilement dans l’histoire et je ne me suis pas ennuyée une seule seconde.

J’ai eu l’impression d’accompagner les personnages dans leur tour des Pyrénées. Les paysages étaient magnifiquement décrits, le vocabulaire était riche. J’ai adoré avoir des précisions sur les chemins empruntés par Emile et Joanne, sur les villages traversés ou, plus simplement, sur les reflets du soleil sur la montagne. Ces passages de description étaient très immersifs. J’ai d’ailleurs eu un coup de cœur pour le petit village d’Eus : j’ai envie de partir en vacances là-bas 😉 Je vous partage quelques photos trouvées sur Flickr pour vous montrer la beauté de l’endroit.

La lecture était également fluide car on passe des randonnées aux pensées des personnages, sans interruption. Tout s’enchaînait avec une facilité déconcertante. Cela faisait longtemps que je ne me m’étais pas autant laissée porter par un récit.

Un voyage introspectif

De nombreuses citations littéraires parsèment par ailleurs le roman. Ma préférée, c’est celle de Proust, prononcée par Joanne : « le véritable voyage de découverte ne consiste pas à chercher de nouveaux paysages, mais à avoir de nouveaux yeux ». « Ce qui veut dire que ce voyage qu’on fait, toi et moi, c’est avant tout un voyage intérieur… Une introspection », explique-t-elle un peu plus tard à Emile. Et j’ai adoré cette idée d’entreprendre un périple pour se perdre au fond de soi-même.

Cette exploration de soi était très bien amenée par Mélissa Da Costa. On faisait souvent irruption dans les pensées d’Emile et Joanne. Emile marche sur un sentier et, l’activité physique calmant son esprit, il se perd dans les méandres de sa mémoire. On découvre peu à peu quelle a été sa vie. Son meilleur ami Renaud, sa grande sœur Marjorie, son ex petite-amie Laura, … Ces personnages ont tous contribué à faire d’Emile ce qu’il est devenu aujourd’hui, et on apprend à les connaître au fil de ses souvenirs.

J’ai adoré découvrir le passé de nos deux voyageurs. Et le passage ci-dessous, qu’Emile adresse à son ex petite-amie Laura, m’a bouleversée.

Je crois qu’on n’aime vraiment qu’une fois dans sa vie. Moi c’était toi. Ça ne sera personne d’autre.
Ça n’est pas triste… Ça n’est pas donné à tout le monde d’aimer vraiment. J’ai eu cette chance. J’en suis reconnaissant.

Les personnages prennent ainsi pas mal de recul sur leurs vies respectives, perdus au milieu des montagnes des Pyrénées. Il font aussi la rencontre d’habitants très avenants. Tout ce cadre naturel, purifiant, m’a revigorée. Cela peut semblait un peu fort ce que je dis, mais ce roman a vraiment eu des vertus apaisantes sur moi. Le périple d’Emile et Joanne m’a détendue.

C’est d’ailleurs au cœur de ce voyage que les deux personnages principaux vont apprendre à se connaître.

Emile et Joanne, un duo émouvant

Emile a d’abord été déçu par Joanne. Il ne s’attendait pas à ça. Son mutisme et sa manie de fixer le ciel bleu pendant des heures le troublent, l’interrogent. Il se demande qui est cette femme, prête à embarquer à bord d’un camping-car avec un parfait inconnu. L’extrait ci-dessous m’a à ce titre énormément plu par sa beauté.

Il a compris maintenant. Il s’est fourvoyé. Le ton de son message, totalement décalé… Il a pris cela pour du défi, de l’espièglerie. Il a cru avoir affaire à une personnalité hors norme, un peu loufoque, un peu extravertie. Il s’est trompé. Le ton était bien décalé oui, mais pour une raison simple… Cette fille est à côté de la plaque, à côté de ses pompes, à côté de sa vie. Elle est perdue. Elle est ailleurs. Elle doit être à peine consciente d’être vivante.

Joanne a une histoire bien particulière ; elle m’a tout de suite intriguée. J’ai envie de vous parler de son personnage sous toutes les coutures, tellement il m’a plu. Mais je vais m’abstenir, pour ne pas vous gâcher la lecture 😉 Sachez en tout cas que cette femme est très attachante, j’ai adoré la voir se dévoiler au fil des pages.

Ce que j’ai particulièrement apprécié chez elle, c’est qu’elle apprend à Emile à pratiquer la méditation en pleine conscience. Grâce à elle, on regarde autour de soi, on regarde vraiment, et on se réjouit des petits bonheurs de la vie.

Il y a un autre point qui m’a beaucoup marquée. Au début, on est plongé dans les pensées d’Emile, condamné à une mort prochaine. Au fur et à mesure que celui-ci perdait la mémoire, c’est Joanne qui a pris le relais. Elle est devenue la narratrice principale de l’histoire. J’ai trouvé cela très émouvant. Je ne sais pas si c’était voulu par l’auteure, mais ça donnait l’impression qu’Emile et Joanne formaient un tandem : quand l’un tombe, l’autre le relève. Comme s’ils étaient destinés à se rencontrer…

Comme vous l’aurez compris, cette lecture, très apaisante, m’a transportée. L’histoire reste d’ailleurs crédible du début à la fin. Celle-ci est énormément touchante. Le dénouement était prévisible, certes, mais Mélissa Da Costa nous réserve une ultime surprise dans l’épilogue.

Je vous conseille vivement ce roman, si vous ne l’avez pas encore lu. Très honnêtement, il est impossible de ne pas aimer, au moins un peu. Toutes les critiques élogieuses reçues sont justifiées !

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